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- Protéger, rénover, valoriser le patrimoine histori...
Le patrimoine architectural n’est pas une contrainte ou une charge, mais une richesse et une chance. Au service des territoires, il contribue à faire rayonner notre pays. Le patrimoine est plus que jamais au cœur d’enjeux essentiels pour les collectivités territoriales françaises et leur avenir.
Sa protection, sa restauration et sa valorisation constituent des vecteurs à part entière de développement de nos communes. Faire revivre des centres-villes et des centres bourgs, favoriser le développement de l’économie locale, soutenir la création d’emplois non délocalisables, former et transmettre des savoir-faire... Loin de gêner le progrès, le patrimoine le génère.
La protection du patrimoine est également une ambition d’utilité publique, car nos bâtiments sont porteurs d’histoire. À l’heure où la cohésion nationale est questionnée, il s’agit d’un enjeu-clé en matière de culture, car le patrimoine est au service de toutes les communautés, de tous les habitants, et permet de se retrouver autour d’un projet commun. « Si la beauté appartient à tout le monde, nous sommes individuellement et collectivement responsable de ce patrimoine » soulignait avec force Stéphane Bern lors de la dernière audition consacrée à ce rapport. En définitive, ce « bien reçu des pères » - littéralement le sens premier de « patrimoine » - est un bien essentiel, un trésor que nous partageons en héritage et que les maires, reconduits ou nouvellement élus, doivent avoir à cœur de protéger.
La France dispose d’un patrimoine exceptionnel. Elle compte 45 285 édifices patrimoniaux protégés au titre des monuments historiques, dont 13 517 classés et 31 768 inscrits, étant précisé que 14 670 communes comptent au moins un monument historique. À ce patrimoine déjà considérable, il faut ajouter tout le patrimoine culturel immobilier non protégé et non labellisé dont le recensement au niveau national représente un travail titanesque, aujourd’hui encore très parcellaire.
On estime cependant que 23 % des immeubles protégés au titre des monuments historiques sont en mauvais état ou en péril.
Les communes sont les premières propriétaires de biens immobiliers culturels. Elles détiennent 41% des monuments historiques protégés, classés ou inscrits, alors que les propriétaires privés en détiennent 43 %, le reste appartenant à l’État notamment. La grande majorité du « patrimoine communal » se situe dans des petites communes. Or celles-ci sont souvent confrontées à des difficultés de financement, ainsi que les intercommunalités qui ont choisi d’exercer des compétences en matière d’équipement culturels.
Les élus locaux ont pleinement conscience que ce patrimoine est aujourd’hui un facteur de cohésion sociale et qu’il constitue un élément de transmission entre les générations. Ils n’ignorent pas qu’il est aussi un facteur d’attractivité pour l’économie locale et qu’il fournit souvent des emplois non délocalisables aux entreprises artisanales et au secteur du tourisme. Enfin, les élus ne perdent pas de vue que ce patrimoine devient de plus en plus un élément d’aménagement du territoire qui intègre les enjeux du développement durable, afin d’offrir un cadre de vie de qualité aux habitants et aux entreprises.
Les maires peuvent se sentir démunis face à la pluralité des enjeux, a fortiori s’ils n’ont pas de formation adéquate ou manquent d’informations sur les outils existants. Ils déplorent que les démarches s’apparentent souvent à un parcours du combattant, alors que le patrimoine peut s’avérer un extraordinaire levier de développement pour leur territoire.
Comment préserver le patrimoine, le faire vivre et éviter sa dégradation ?
Les maires doivent être en mesure de « maîtriser toute la chaîne de la valorisation du patrimoine » .
La situation rencontrée sur le terrain par les maires leur demande de faire face trois enjeux fondamentaux :
Liste des principales recommandations
Recommandation n° 1 : Associer les jeunes générations aux enjeux du patrimoine comme vecteur d’identité partagée, en mobilisant les ministères de l’Éducation nationale et de la Culture afin d’inclure dans les programmes scolaires des actions de sensibilisation à la richesse du patrimonial historique et architectural local.
Recommandation n° 2 : Encourager les Français au « patriotisme patrimonial et culturel » en mobilisant les élus locaux pour soutenir et relayer au maximum, au niveau local, l’initiative «Cet été je visite la France », notamment en favorisant toutes les actions incitant les jeunes à se réapproprier le patrimoine de proximité.
Recommandation n° 3 : Profiter des interventions menées sur le patrimoine bâti architectural pour en faire un outil à part entière de valorisation économique: au service de l’emploi artisanal local, du dynamisme commercial et touristique, et de la revitalisation des centres- villes et des centres-bourgs.
Recommandation n° 4 : Ne pas déconnecter la protection et la valorisation du patrimoine bâti architectural des enjeux d’urbanisme et d’environnement en inscrivant pleinement celui-ci dans un projet de territoire.
Recommandation n° 5 : Profiter de la nouvelle mandature municipale qui s’ouvre pour développer l’approche pluridisciplinaire faisant du patrimoine un élément à part entière de l’aménagement du territoire et l’intégrer plus systématiquement aux documents d’urbanisme.
Recommandation n° 6 : Lancer, sous l’égide du ministère de la Culture et pilotée par les DRAC, une opération nationale coordonnée d’inventaire précis du patrimoine protégé et non protégé, s’appuyant sur des inventaires décentralisés réalisés par les maires, en collaboration avec les services de l’inventaire régional et les associations de protection du patrimoine.
Recommandation n° 7 : Encourager les maires, lors de l’élaboration des documents d’urbanisme, à privilégier l’utilisation du PLU ou du PLUI comme outil de préservation et de valorisation du patrimoine protégé et non protégé, afin de réaliser les bons diagnostics et les propositions d’intervention les plus pertinentes sur le bâti.
Recommandation n° 8 : Rendre plus actif le patrimoine en sensibilisant les maires au développement de nouveaux usages du patrimoine historique bâti dont les communes sont propriétaires, notamment la reconversion en logements, en commerces, ou encore en lieux de vie ou de services aux usagers.
Image Image Image Image ImageRecommandation n° 9 : S’agissant en particulier des églises, encourager les maires à privilégier le recours au bail emphytéotique plutôt que la vente et à envisager, avec l’accord de l’affectataire, de nouveaux usages mixtes pour préserver leur dimension cultuelle.
Recommandation n° 10 : Rendre plus vivant le patrimoine en encourageant les maires à mettre en place des animations ou à organiser des événements autour des sites patrimoniaux, qui associent les habitants afin que ceux-ci s’approprient le patrimoine et soient incités à le valoriser.
Recommandation n° 11 : Privilégier les opérations de réhabilitation du bâti existant plutôt que les constructions nouvelles afin de préserver et valoriser le patrimoine, en particulier dans le cadre des initiatives de revitalisation des centres-villes et des centres bourgs.
Recommandation n° 12 : Encourager les maires à déployer des projets innovants et hybrides mêlant la protection du patrimoine, le développement du commerce, de la culture et de l’éducation, en envisageant, par exemple, la mise à disposition d’un édifice ou d’un bâtiment communal d’intérêt patrimonial à des artistes ou des associations en échange d’un projet de réhabilitation autofinancé.
Recommandation n° 13 : Encourager les maires à faire labelliser le patrimoine de leur commune quand cela est possible et à profiter du coup de projecteur désormais offert par les sites de tourisme et surtout les réseaux sociaux.
Recommandation n° 14 : Mettre à disposition des maires des « fiches conseil » rédigées par les architectes des bâtiments de France (ABF) pour les aider à effectuer un diagnostic patrimonial et les éclairer sur les questions réglementaires.
Recommandation n° 15 : Prévoir, en début de mandat municipal, une rencontre entre l’architecte des bâtiments de France (ABF) et le maire, sous la forme d’un module de formation aux enjeux de préservation et de valorisation du patrimoine, afin d’amorcer un dialogue systématique.
Recommandation n° 16 : Demander au ministère de la Culture de missionner les architectes des bâtiments de France (ABF) pour qu’ils édictent, en partenariat avec les associations locales de maires, des brochures et des guides d’entretien à destination des communes propriétaires, et qu’ils assurent une mission de conseil en matière d’entretien.
Recommandation n° 17 : Encourager les maires à flécher des financements en direction de l’entretien des monuments afin d’éviter des travaux lourds de restauration futurs.
Recommandation n° 18 : S’inspirer de l’expérience menée avec succès en Bretagne, en généralisant, au niveau des DRAC, l’assistance à maîtrise d’ouvrage en direction des petites communes et des communes rurales, en particulier s’agissant du patrimoine non protégé.
Recommandation n° 19 : Encourager les maires à solliciter l’assistance à maîtrise d’ouvrage, gratuite et de droit, des services de l’État s’agissant du patrimoine inscrit ou classé, en recourant aux services des architectes des monuments historiques.
Recommandation n° 20 : Encourager les maires à solliciter plus systématiquement les Architectes conseils de l’État (ACE) en particulier : dans leur mission d’information et de conseil ; d’accompagnement et de médiation avec les ABF ; lors de l’élaboration des documents d’urbanisme ; et sur les projets concernant le patrimoine contemporain.
Recommandation n° 21 : Inciter les maires, en début de mandat, à suivre les formations courtes dispensées dans les territoires par les CAUE en matière de protection et de valorisation du patrimoine.
Recommandation n° 22 : Préserver les CAUE au niveau départemental et inciter les maires à recourir à leurs services en matière de connaissance et d’identification du patrimoine, notamment à travers l’élaboration de cartographies patrimoniales s’appuyant sur les outils numériques.
Recommandation n° 23 : Inciter les maires, notamment des petites communes rurales, à recourir plus systématiquement aux services des CAUE, en particulier pour envisager les transformations d’usage du patrimoine bâti existant.
Recommandation n° 24 : Encourager les maires à recourir aux architectes pour réaliser un inventaire patrimonial de l’ensemble de la commune et pour réunir les compétences nécessaires aux interventions sur le patrimoine bâti.
Recommandation n° 25 : Lutter contre la perte des compétences dédiées au patrimoine en missionnant le ministère de l’Éducation nationale, en partenariat avec celui du Travail et celui de la Culture, pour :
- conduire une campagne de sensibilisation auprès des étudiants afin de les encourager à s’orienter vers les métiers des filières techniques et artisanales
- augmenter le nombre de places ouvertes dans les concours d’accès à ces filières ;
- créer une filière spécialisée sur le patrimoine et la restauration.
Recommandation n° 26 : Prévoir un volet « patrimoine » dans les missions de l’Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT).
Recommandation n° 27 : Mettre en place, auprès du préfet de département, une réunion « patrimoine » dédiée au sein de l’ANCT associant tous les acteurs de la protection et de la valorisation du patrimoine, réunie à la demande du maire pour fournir l’ingénierie nécessaire aux projets, et disposant d’un référent administratif désigné au sein de la DRAC.
Recommandation n° 28 : Missionner cette réunion « patrimoine » dédiée de l’ANCT pour établir une programmation pluriannuelle des investissements de l’État et des communes en matière patrimoniale distinguant bien les dépenses d’entretien et celles de restauration.
Recommandation n° 29 : Encourager les maires à solliciter plus systématiquement les aides déployées par les départements et les régions, que ce soit en matière de financement ou en matière d’ingénierie, au service de l’entretien et de la valorisation du patrimoine bâti architectural communal.
Recommandation n° 30 : Préserver et renforcer, dans les prochaines lois de finances, les moyens dédiés au Fonds incitatif et partenarial pour les petites communes.
Recommandation n° 31 : Encourager les maires à solliciter le soutien financier et technique de la Banque des Territoires qui accompagne, en ingénierie et en investissements financiers, les porteurs de projets dans le domaine de la préservation et de la valorisation du patrimoine remarquable.
Recommandation n° 32 : Pérenniser le dispositif du Loto du patrimoine en supprimant définitivement les taxes qui pèsent sur lui afin de se prémunir contre un risque de baisse des recettes dans les années à venir.
Recommandation n° 33 : S’appuyer sur l’aide des fondations et des associations de protection du patrimoine pour participer au financement des projets, organiser des formations, piloter des chantiers de bénévoles, ou conduire des actions de sensibilisation du public (en particulier auprès des jeunes), aux enjeux du patrimoine.
Recommandation n° 34 : Sensibiliser les maires à la faculté de faire appel à des structures associatives ou des cabinets privés pour leur fournir une assistance à maitrise d’ouvrage et des prestations de conseil sur des projets de protection, restauration ou valorisation du patrimoine.
Recommandation n° 35 : Encourager les maires à recourir aux différents outils de collectes de dons (mécénat, souscriptions), notamment les plus innovants (plates-formes de financement participatif etc.) pour mobiliser des fonds privés en faveur de la préservation du patrimoine architectural et monumental local.
Recommandation n° 36 : Sensibiliser les maires à la possibilité d’opter pour une gestion déléguée d’un site patrimonial remarquable lorsque cela est financièrement plus rentable, au profit d’un opérateur public comme le Centre des monuments nationaux, ou un opérateur privé spécialisé qui assumera seuls les coûts de gestion.
Synthèse par Eric WIRTH, vice-président du Conseil national de l'Ordre
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Culture architecturale | Patrimoine | Revalorisation | Art
ARCHITECTE ou société d’architecture
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