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Lorsqu’une demande d’autorisation d’urbanisme est déposée, le service instructeur a un mois pour demander des pièces complémentaires, mais seulement celles prévues par le Code de l'urbanisme. Toute demande supplémentaire non prévue est donc illégale et n’interrompt ni ne modifie le délai d’instruction.
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A l’expiration du délai d’instruction, le pétitionnaire obtient une décision de non-opposition ou un permis tacite, comme l’a confirmé le Conseil d'État dans un arrêt du 9 décembre 2022.
Lors du dépôt d’une déclaration préalable ou d’une demande de permis de construire, d'aménager ou de démolir, le service instructeur dispose d’un mois pour demander des pièces complémentaires. Celles-ci, qui sont limitatives et dépendent de la nature du projet et de la localisation du terrain, doivent figurer parmi celles listées par le Code de l'urbanisme.
Aucune autre information ou pièce ne peut être exigée par le service instructeur !
Il convient de distinguer 3 types de pièces :
Une fois la demande d’autorisation d’urbanisme déposée, le service instructeur dispose d’un délai d’un mois pour notifier au demandeur une demande de pièces manquantes, conformément à l'article R*423-41 du Code de l'urbanisme.
Cette demande de pièce complémentaire interrompt le délai d’instruction de la demande d’autorisation : ce délai est d’un mois pour les déclarations préalables, de deux mois pour les demandes de permis de démolir et pour les demandes de permis de construire portant sur une maison individuelle et de trois mois pour les autres demandes de permis de construire et pour les demandes de permis d'aménager, ainsi que le prévoit l’article R*423-23 du Code de l'urbanisme.
Lorsque de dossier n’est pas complet, le pétitionnaire dispose alors d’un délai de 3 mois pour adresser les pièces complémentaires au service instructeur.
Cependant, il arrive parfois que les services instructeurs demandent aux pétitionnaires des pièces complémentaires non prévues par le Code de l’urbanisme. Le Conseil d’Etat, dans son arrêt du 9 décembre 2022 (Conseil d'État, Section, 09/12/2022, 454521) donne ainsi un éclairage sur les conséquences de ces demandes illégales.
Dans cette affaire, une société de télécommunication avait soumis une déclaration préalable portant sur l’implantation d'une antenne-relais de téléphonie mobile dans une commune. L'administration avait demandé des précisions supplémentaires sur la simulation de l'exposition aux ondes électromagnétiques émises par l'installation sur le plan de masse des constructions à édifier. Cette pièce complémentaire n’est requise par le Code de l'urbanisme. Le maire avait pris une décision d’opposition par un arrêté du 1er décembre 2020, invoquant pour motiver son refus une atteinte à l'environnement proche.
Saisi par le pétitionnaire, le juge des référés du Tribunal administratif de Nantes a jugé que la pièce demandée par la commune ne figurait pas parmi celles exigibles par le Code de l'urbanisme, le délai d'instruction d’un mois imparti à la commune pour instruire la déclaration préalable n'avait pas été suspendu. Ainsi, la société devait être considérée comme titulaire d’une décision implicite de non-opposition à déclaration préalable.
La commune a alors formé un pourvoi en cassation.
La question qui devait être tranchée par le Conseil d’Etat était de savoir si les demandes de pièces complémentaires illégales des services instructeurs entraînent une décision implicite d’autorisation d’urbanisme (DP ou PC) à l'expiration du délai d'instruction.
Dans son arrêt du 9 décembre 2022, le Conseil d'État confirme la position du juge des référés du TA de Nantes. Il estime que les demandes de pièces complémentaires non prévues par le Code de l'urbanisme sont illégales et ne suspendent pas le délai d'instruction imparti aux services instructeurs. L’autorisation d’urbanisme est donc tacitement accordée au pétitionnaire à l’issue du délai d’instruction.
A noter que le Conseil d’Etat revient sur sa jurisprudence antérieure (Conseil d'État, 9 décembre 2015, commune d'Asnières-sur-Nouère, requête n° 390273), selon laquelle une demande de pièces complémentaires illégale était de nature à entacher d’illégalité le refus d’accorder l’autorisation d’urbanisme, sans toutefois « avoir pour effet de rendre le pétitionnaire titulaire d’une décision implicite de non-opposition ».
Enfin, dans un rapport de la Cour des comptes de septembre 2024 intitulé « La délivrance des permis de construire », l'institution critique les pratiques de certains services instructeurs qui continuent d'exiger des pièces non prévues par le Code. Elle souligne que ces demandes tendent à « alourdir le parcours des pétitionnaires, et génèrent des délais et des coûts supplémentaires », malgré l'objectif affiché d'améliorer la qualité architecturale et environnementale des projets ou de mieux les sécuriser en cas de contentieux.
A retenir :
La décision du Conseil d’État du 9 décembre 2022 est favorable aux pétitionnaires. Seules les pièces complémentaires prévues par l’article R.431-4 du code de l’urbanisme pour les permis de construire et l’article R*431-36 du Code de l’urbanisme pour les déclarations préalables peuvent être demandées par les services instructeurs.
Toute demande de pièce complémentaire irrégulière n’interrompt pas le délai d’instruction, qui commence à courir dès le dépôt du dossier complet de permis de construire. En conséquence, une autorisation tacite peut être accordée si ce délai est dépassé.
ARCHITECTE ou société d’architecture
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