Assises de l'Architecture et du Patrimoine #2 - 6 juin 2024 à Biguglia
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Organisées par la Collectivité de Corse, les Assises de l'Architecture et du Patrimoine se sont tenues le 6 juin 2024 à Biguglia. L’Ordre des Architectes de Corse a participé activement à cette seconde édition qui avait pour thème « Un nouveau cadre pour l’éducation », avec d’une part, l’organisation d’une table ronde sur la construction et rénovation du bâti scolaire, notamment sur l’amélioration du confort d’été dans les écoles, et d’autre part, l’exposition de projets d’architectes insulaires qui ont répondu à notre appel à participation pour contribuer à la réflexion sur ce thème.
Retrouvez, ci-après, l’allocution inaugurale de la présidente Sylvia Ghipponi, la présentation de la table ronde animée par la vice-présidente Amandine Albertini, et les projets qui ont été exposés.
Assises de l'Architecture et du Patrimoine #2 - 6 juin 2024 à Biguglia
Au nom du Conseil de l’Ordre des Architectes de Corse, je tiens tout d’abord à remercier la conseillère exécutive Antonia Luciani de nous avoir invités à participer et organiser, avec ses services, cette seconde édition des Assises de l’Architecture et du Patrimoine, sur le thème « un nouveau cadre pour l’éducation ». Merci également au président du CAUE et maire de Biguglia, Jean-Charles Giabiconi, pour son accueil.
« Architecture et éducation », c’est un vaste sujet de « convergences ou divergences des conjonctures politique et scientifique », comme le décrit la sociologue Marie-Claude Derouet-Besson, une spécialiste des politiques publiques d’éducation, et en particulier des constructions scolaires, qui en a fait le titre d’un ouvrage paru en 1996.
L’architecture scolaire est en effet une architecture « profondément chargée de l’idéologie du moment » et qui « témoigne souvent de l’ambition des pouvoirs en place à éduquer et former selon leurs critères ».
L’histoire de l’architecture scolaire est assez récente finalement. D’abord installées dans des lieux déjà construits pour d’autres fonctions, le plus souvent dans des bâtiments religieux (des couvents notamment, c’est le cas en Corse aussi), les écoles de la république se dessinent à la fin du 19ème siècle, avec des plans types : cour, préau, couloir, classes. Après des expérimentations intéressantes dans les années 30, comme « l’école de plein air », les années 50 à 75 sont marquées par l’industrialisation, due à l’explosion des effectifs et aux besoins de reconstruction. Nous héritons aujourd’hui de ce patrimoine bâti, imparfait à de nombreux égards, mais qu’il faut conserver, transformer ou réparer.
Alors que Michel Foucault souligne en 1975 dans « Surveiller et punir » une « proximité architecturale et conceptuelle entre la prison, la caserne, et le lycée à la française », l’architecture plus contemporaine va penser différemment ces espaces d’apprentissage et lieux de socialisation. Les constructions plus récentes, de la fin du 20ème siècle ou du début du 21ème, s’orientent davantage vers une idée du bien-être à l’école.
Sujet ô combien important pour les architectes, le bâti éducatif et scolaire est une catégorie de projets d’équipements particulièrement affectionnée, son architecture influe sur le bien-être des enfants, se doit d’être à la fois inclusive et ludique, en créant un environnement stimulant, épanouissant. Le rôle de l’architecture est souligné unanimement dans la réussite des élèves. Dans un article dédié à l’exposition « Bâtir l’école » en 2021, Libération rappelle à juste titre que « dans l’art d’enseigner, la qualité des lieux compte au moins autant que celle des enseignants ».
Il ne faut pas perdre de vue cette histoire, et ces aboutissants, dans la nouvelle phase que nous sommes en train de vivre aujourd’hui.
Où en sommes-nous aujourd’hui ? Au niveau national, l’état a lancé fin 2023 un « Plan de rénovation des écoles » : sur les 48 950 écoles existantes en France, il prévoit d’en rénover 40 000 d’ici 10 ans, soit 80%, et a mis en place un parcours simplifié pour les maires, maîtres d’ouvrages de ces équipements. Pour la Corse, qui compte 254 écoles, si on applique ce même ratio de besoin de rénovation, ce serait donc près de 200 écoles à rénover en 10 ans. Objectifs de l’état : Réduire la consommation d’énergie et développer les énergies renouvelables.
Pour les collèges et lycées, la conseillère exécutive l’a rappelé, c’est la Collectivité de Corse qui a en charge les 50 établissements de l’île. C’est elle qui finance, construit, équipe et entretient. Objectifs du Conseil Exécutif de Corse : Participer à la lutte contre le changement climatique, limiter les coûts de fonctionnement, améliorer la qualité de vie et de travail de la communauté éducative.
Nous aurons l’occasion d’écouter, dans la 1ère table ronde, l’AMO de la Collectivité de Corse, Zaid Haddou, pour 2 établissements publics locaux d’enseignement : le campus Agri’corsica u Rizzanesi à Sartène, et le lycée Giocante de Casabianca à Bastia.
Pourquoi un nouveau cadre ? Que ce soit dans la rénovation ou la construction neuve, il faut donc penser un nouveau cadre pour l’éducation qui devra répondre à des enjeux multiples. Baisser la consommation énergétique des bâtiments. Baisser les émissions de GES des bâtiments. Préserver les ressources. S'adapter aux nouveaux risques, les vagues de chaleur, notamment, devraient être plus fréquentes et plus intenses. Elles vont impacter le fonctionnement des établissements dont le bâti n’est pas conçu pour y faire face. Lutter contre les îlots de chaleur. Préserver la biodiversité. Améliorer la qualité du bâti et la qualité d'usage…
Comment y arriver ? Nous le verrons lors des tables rondes, les architectes ont un rôle primordial à jouer. Et ils ont des solutions à proposer. En réparant l'existant. En transformant l'existant : surélever un bâti scolaire quand c’est pertinent, faire une extension d’une école existante. En encourageant la production d’énergies renouvelables. En ménageant le territoire, ces projets, comme d'autres devront limiter l’artificialisation et l’ouverture à l’urbanisation de terres agricoles ou naturelles. En privilégiant l'écoconstruction. En renaturant les sols. En végétalisant…
Quelle meilleure preuve que l’exemple ? Pour illustrer les propositions du plaidoyer des architectes pour l’habitat, les villes et territoires, le Conseil national de l’Ordre a publié cette année 16 projets. Parmi ces projets, on trouve 2 projets d’écoles. Le 1er projet est une construction d’une école en bois-paille ventilée naturellement à La Selle-Craonnaise, en Pays de la Loire, par les architectes Huitorel & Morais[1]. Le 2ème est une rénovation biosourcée de l'école Jules Ferry à Montmorency, en Ile-de-France, par les architectes Meandre etc et Alt’R Architecture[2], et nous avons proposé à la Collectivité de Corse que l’architecte Claire Fournier Montgieux vienne présenter son projet assez exemplaire lors de la 1ère table ronde.
En effet, s’appuyer sur les bons exemples, partager les bonnes pratiques, notamment dans notre environnement méditerranéen, nous le verrons aussi avec Frédéric Corset, directeur d’EnvirobatBDM, à qui nous avons proposé de participer également à la 1ère table ronde.
Plus spécifiquement pour la Corse, nous avons donné la possibilité aux architectes insulaires de participer à la réflexion collective en portant à votre connaissance leurs projets. Crèches, écoles, collèges, enseignement supérieur… En études, en cours de construction ou livrés. Aucune sélection n’a été effectuée, ils défilent derrière moi et illustrent également des démarches intéressantes, audacieuses, exemplaires, ou innovantes. Ils sont affichés pendant deux jours dans l’auditorium pour une meilleure appréhension.
Parmi ces projets, celui de la construction de l’école de Patrimoniu sera présenté par l’agence CGZ dans la 1ère table ronde.
Pour les projets à venir, je rappelle que les architectes sont à la disposition des maîtres d’ouvrages pour identifier avec eux les écoles à rénover, réaliser des diagnostics et des études de faisabilité, en élaborant différents scenarios, de la rénovation à la transformation mais aussi en construction neuve, qui répondent simultanément aux enjeux identifiés. Ces études préalables sont indispensables aux maîtres d’ouvrages pour développer leur projet et leur recherche de financements.
A mon avis, les architectes devraient participer également, le plus possible, aux études de programmation en amont des projets. Programmations qui se devront d’être les plus ambitieuses et innovantes possibles.
Ils assureront ensuite, avec les bureaux d’études, la conception et la maîtrise d’œuvre de ces projets. C’est le cœur de notre métier.
Pour ce cœur de métier, je voudrais m’adresser aux maîtres d’ouvrages, collectivités et maires. L’urgence à rénover, à construire, ne doit pas faire oublier la qualité du projet. Les marchés de conception-réalisation, autorisés pour ces opérations, ne doivent pas être la règle. Il y a de trop nombreuses dérogations aujourd’hui pour le recours à ce type de marché : principalement pour la santé, l’intérieur et le logement, mais aussi le tiers financement, la conception-réalisation devient donc un outil commun, et il est effectif dans le cadre du plan de rénovation des écoles.
Or les architectes, en nombre, craignent un fort développement de ce type de marché, qui comporte de nombreux risques : difficultés à respecter la définition réglementaire de la mission de base de maîtrise d’œuvre, moyens de contrôle de l’architecte minimisés dans sa mission auprès du maître d’ouvrage, et notamment, la position de juge et partie à la réception des ouvrages, qualité des projets qui peut être revue à la baisse quand certaines entreprises ont pour objectif de les simplifier, risque pour l’opération et pour l’architecte quand il est mandataire du groupement en cas de défaillance de l’entreprise…
N'opposons pas urgence et qualité. Faisons-le en sanctuarisant le temps de la conception. C’est là que tout se joue, que tout se fait et se défait. Mettons en concurrence les équipes de maîtrise d’œuvre, organisons des concours, et donnons-leur l’opportunité de proposer, contre-proposer, car c’est dans ce débat d’idées que se produisent les meilleurs projets.
Sylvia Ghipponi, présidente de l'Ordre des Architectes de Corse
[1] Construction d’une école en bois-paille ventilée naturellement à La Selle-Craonnaise par les architectes Huitorel & Morais
[2] Rénovation biosourcée de l’école Jules Ferry à Montmorency par les architectes Meandre etc’ et Alt’R Architecture
Le plaidoyer en 16 cas pratiques
Bonjour à tous.
Tout d’abord, merci, à la Collectivité de Corse et à Mme Luciani de nous avoir permis de réunir le groupe de personnes ici présent afin d’évoquer l’amélioration du confort d’été dans les écoles et plus généralement les établissements qui dispensent des enseignements.
Nous avons tous été confrontés, de près ou de loin au spectacle désolant d’une cours de récréation qui n’a de rafraichissant que le nom. Plus d’arbres, plus de terre, plus d’eau… mais des tartines de bitume et des piliers de préau capitonnés… Quand préau il y a.
Quand on sait que l’on parle d’inconfort thermique quand la température d’une pièce dépasse 28 degrés et qu’en Corse, la température extérieure atteint régulièrement les 38.
C’est un peu comme quand les réseaux sociaux comparent le vestiaire de l’homme des années 60 à celui d’aujourd’hui… on ne peut s’empêcher de se dire : que s’est-il passé ?
Plus sérieusement, on parle ici de lieux de transmission, de savoirs, de connaissance. On parle d’enfants, d’adolescents, d’énergies à canaliser…
Il existe des gestes simples à adopter, des comportements de projet vertueux qui permettent sobrement de re placer le bien être des usagers au centre du débat.
Pour en parler nous allons d’abord demander à :
ARCHITECTE ou société d’architecture
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